• Dans l'intérêt de l'industrie automobile allemande

    La Commission européenne relativise l'accord douanier avec les Etats-Unis ; Washington et Bruxelles présentent différemment le contenu de l'accord. L'accord devait servir les intérêts de l'industrie automobile allemande et a été soutenu par Berlin.

    WASHINGTON/BRUXELLES/BERLIN (rapport exclusif) - La Commission européenne relativise le deal douanier conclu dimanche par sa présidente Ursula von der Leyen avec le président américain Donald Trump. Il s'agit d'un « accord politique » qui « n'est pas juridiquement contraignant », indique la Commission dans un communiqué publié mardi. Washington et Bruxelles ont par ailleurs chacun publié une présentation du contenu supposé de leur accord douanier, qui diffère clairement sur des sujets clés. Il est incontestable que l'accord prévoit des droits de douane de 15% sur la plupart des importations de l'UE vers les Etats-Unis, mais un accès au marché européen sans droits de douane pour les exportations américaines. Lundi, des responsables politiques français avaient déjà déclaré que l'accord revenait à « soumettre » l'UE aux Etats-Unis. Il ne faut pas l'accepter sans résister si l'on veut maintenir la prétention que l'UE est une « puissance économique ». L'accord lui-même a été soutenu par le gouvernement allemand, car il prend en compte les intérêts de l'industrie automobile allemande. Celle-ci traverse une crise profonde et ne peut pas se permettre de prendre des risques dans son importante activité US. Lire la suite

  • Massacre par la politique de sanctions

    Selon une étude récente, plus d'un demi-million de personnes sont tuées chaque année en raison des sanctions occidentales - environ cinq fois plus que le nombre moyen de morts au combat dans les guerres.

    LONDRES/BERLIN (rapport exclusif) - Les régimes de sanctions des puissances transatlantiques, dont l'Allemagne et l'UE, font plus d'un demi-million de morts chaque année dans les pays concernés. C'est le résultat d'une nouvelle étude rapportée la semaine dernière par la prestigieuse revue médicale The Lancet. Selon cette étude, plus de 564.000 personnes meurent en moyenne chaque année des suites de sanctions telles que la faim, le manque de soins médicaux et l'absence d'aide. Les enfants et les personnes âgées sont bien plus touchés que la moyenne. Le nombre de victimes de sanctions est cinq fois plus élevé que le nombre de personnes qui meurent chaque année dans des conflits armés. L'étude présentée dans The Lancet confirme largement ce que l'on sait depuis longtemps sur la base d'études de cas. Par exemple, dans les années 1990, un demi-million d'enfants sont morts en Irak à cause des sanctions de l'époque. En 1996, la secrétaire d'État américaine Madeleine Albright a déclaré que les objectifs politiques poursuivis par les sanctions « valaient ce prix ». Les sanctions contre l'Afghanistan, par exemple, continuent de provoquer des dommages dramatiques au sein de la population. Lire la suite

  • Toujours pas de décollage

    Merz et Macron reportent à fin août la résolution du différend concernant l'avion de combat franco-allemand de sixième génération (SCAF). Le projet est menacé par des divergences non résolues et par la concurrence britannique.

    BERLIN/PARIS (rapport exclusif) – Le chancelier allemand Friedrich Merz et le président français Emmanuel Macron ont reporté à fin août la résolution du différend qui s'intensifie autour de l'avion de combat franco-allemand SCAF (Systéme de combat aérien du futur). Cette décision a été prise lors d'une réunion entre Merz et Macron mercredi soir, compte tenu de l'incertitude croissante quant à l'avenir de cet avion de combat de sixième génération, le plus moderne à ce jour, qui devrait être opérationnel à partir de 2040. Lancé en 2017, ce projet, dont le coût s'élève à plus de 100 milliards d'euros, vise à mettre fin à la dépendance de l'Europe vis-à-vis des Etats-Unis pour les avions de combat les plus modernes et à renforcer l'autonomie stratégique de l'UE dans le domaine de l’armement. Cependant, le projet a été marqué dès le début par des retards et des controverses, principalement dus à des désaccords entre l'Allemagne et la France sur la répartition des fonds et des technologies clés. Dans le même temps, le développement d'un avion de combat de sixième génération concurrent, mené par le Royaume-Uni, progresse plus rapidement ; le « Tempest » devrait être opérationnel dès 2035. Un échec du SCAF constituerait un revers important pour les aspirations de l'UE en matière d'autonomie stratégique. Lire la suite

  • La nouvelle stratégie d'alliance

    L'UE et le Japon annoncent une coopération plus étroite dans la sécurisation de leurs chaînes d'approvisionnement et dans l'industrie de la défense. L'objectif est une plus grande autonomie vis-à-vis de la Chine et des Etats-Unis.

    TOKYO/BRUXELLES (rapport exclusif) - L'UE et le Japon souhaitent renforcer leur coopération en visant une plus grande indépendance à la fois vis-à-vis de la Chine et des États-Unis. C'est ce qui ressort du sommet UE-Japon de cette année, qui s'est tenu hier mercredi à Tokyo. Les deux parties souhaitent devenir indépendantes des terres rares chinoises et acquérir une plus grande autonomie économique.Dans le même temps, elles insistent sur un environnement économique « stable », une position claire contre la politique imprévisible de l'administration Trump, qui utilise des droits de douane même contre ses alliés. En particulier, l'UE et le Japon visent également une coopération plus étroite entre leurs fabricants d'armes afin d'élargir rapidement leur base industrielle en matière d'armement. L'UE cherche à faire de même avec d'autres pays, du Royaume-Uni à la Corée du Sud en passant par le Canada, en utilisant l'un de ses programmes d'armement de pointe appelé SAFE, qui fournit des crédits avantageux pouvant atteindre 150 milliards d'euros. A l'avenir, les alliés non-européens devraient également pouvoir en bénéficier dans une certaine mesure. Des conseillers gouvernementaux à Berlin parlent d'une nouvelle « stratégie d'alliance » - sans les Etats-Unis. Lire la suite

  • Le triangle du pouvoir européen

    L'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne renforcent leur coopération militaire et en matière d'armement dans le but de devenir, à long terme, indépendantes des Etats-Unis pour leurs forces armées et leurs fabricants d'armes.

    BERLIN/LONDRES/PARIS (rapport exclusif) – L'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne intensifient leur coopération militaire et en matière d'armement, visant ainsi à construire une puissance militaire européenne autonome avec une base industrielle de défense indépendante. Le traité de Kensington, signé la semaine dernière par le chancelier allemand Friedrich Merz et le Premier ministre Keir Starmer, sert cet objectif, tout comme plusieurs déclarations franco-britanniques adoptées le 10 juillet. L'objectif est de mettre en place, grâce à un système d'accords bilatéraux entre les trois États les plus puissants d'Europe occidentale, des forces armées binationales puissantes et de lancer une production commune d'armes. À terme, celle-ci devrait se faire sans composants américains, ce qui permettrait aux pays européens de devenir indépendants des Etats-Unis en matière d’armement. Parmi les éléments qui y contribuent, citons notamment le développement conjoint par l'Allemagne et la Grande-Bretagne de missiles de croisière, la production de véhicules blindés par Rheinmetall au Royaume-Uni et les projets franco-britanniques visant à porter à 50 000 soldats la Force expéditionnaire combinée binationale (CJEF) destinée à des missions sur le flanc est de l'OTAN. Lire la suite

  • Chaîne de commandement jusqu'à Damas

    Une violence collective de type pogrom secoue une nouvelle fois la Syrie sous le régime d'Ahmed al Sharaa, soutenu par Berlin, l'UE et les Etats-Unis. Avec son aide, l'Occident cherche à pousser la Russie hors de Syrie.

    DAMAS/BERLIN (rapport exclusif) – Une vague de violence collective de type pogrom contre une minorité secoue une nouvelle fois la Syrie sous son nouveau régime soutenu par Berlin et l'UE. Ces derniers jours, au moins 350 personnes, dont de nombreux civils, ont été tuées lors d'attaques menées par des bandes islamistes contre la minorité druze dans le sud du pays. En mars déjà, plus de 1 500 membres de la minorité alaouite avaient été assassinés lors de violences collectives de type pogrom. Les observateurs estiment que le régime arrivé au pouvoir en décembre après la chute du président Bachar al-Assad, dirigé par le djihadiste de longue date Ahmed al-Sharaa, prétendument repenti, est en train d'imposer à la Syrie un cours fortement islamiste et de tolérer délibérément « la diabolisation des Alaouites, des Druzes » et d'autres minorités – afin d'éliminer toute opposition à son cours. Les pogroms contre les minorités seraient donc systématiques. Non seulement le gouvernement fédéral allemand a facilité la survie d'Al Sharaa et de ses djihadistes à Idlib entre 2017 et 2024, mais il vise également, en collaboration avec d'autres pays occidentaux, à lier la Syrie à l'Occident sous sous son contrôle et à évincer la Russie. Lire la suite

  • L'exceptionnalisme occidental

    L'UE refuse de prendre des mesures contre Israël pour ses crimes de guerre manifestes dans la bande de Gaza. Des critiques s'élèvent dans d'autres régions, notamment dans les pays du Sud, parmi d'anciens ambassadeurs et en Israël même.

    BERLIN/TEL AVIV (rapport exclusif) – L'UE continue de ne prendre aucune mesure contre Israël pour sa guerre dans la bande de Gaza, y compris les récents plans de déportation de la population palestinienne. C'est ce qu'ont décidé hier, mardi, les ministres des Affaires étrangères de l’UE. Selon eux, l'extension, peut-être seulement temporaire, de l'aide humanitaire israélienne à la bande de Gaza suffit à repousser les demandes de certains États membres de l'UE, dont l'Espagne, qui réclamaient au moins une suspension de l'accord d'association avec Israël. L'Allemagne s'est particulièrement engagée pour empêcher toute mesure contre le gouvernement d'extrême droite israélien. Elle a été soutenue par les gouvernements de droite italiens et hongrois. Entre-temps, les critiques et les protestations contre la guerre menée par Israël s'intensifient. L'ancien Premier ministre israélien Ehud Olmert a déclaré qu'il considérait le camp fermé qui doit être construit sur les ruines de Gaza et accueillir dans un premier temps 600 000 Palestiniens comme un « camp de concentration ». À Bogotá, une trentaine d'États se sont réunis hier pour prendre des mesures concrètes contre Israël et mettre fin à l'« exceptionnalisme » occidental qui ignore le droit international. Lire la suite

  • Piraterie en mer Baltique (III)

    Le gouvernement allemand augmente la pression sur les pétroliers russes. Un colonel estonien déclare que la multiplication des attaques aux mines antipersonnel contre les pétroliers russes est une nouvelle tactique de guerre.

    BERLIN/MOSCOU (rapport exclusif) - Le gouvernement allemand cherche à augmenter la pression sur les pétroliers russes (« flotte fantôme ») et a commencé à contrôler les documents d'assurance des pétroliers qui passent près de Fehmarn. L'Allemagne rejoint ainsi d'autres pays riverains de la mer Baltique et de la mer du Nord, de l'Estonie à la Grande-Bretagne en passant par la Finlande, qui procèdent déjà à de tels contrôles depuis un certain temps. Les navires dont l'équipage ne coopère pas peuvent être placés sur des listes de sanctions occidentales. Les spécialistes considèrent cette mesure comme de l'espionnage public. Elle ne peut pas être justifiée par le droit maritime international. Parallèlement, des rapports indiquent que six attaques à la mine maritime ont été perpétrées contre des pétroliers russes rien que cette année. Un colonel estonien déclare que cela pourrait devenir une nouvelle tactique de guerre contre la Russie. De son côté, le gouvernement fédéral s'efforce d'élargir sa marge de manœuvre dans la lutte contre les pétroliers russes et maintient la saisie du pétrolier Eventin, bien qu'un tribunal ait ordonné la suspension de la mesure. En essayant de faire un exemple, Berlin enfreint probablement le droit international, estiment les experts. Lire la suite

  • Pris au piège (II)

    Ursula von der Leyen refuse de prendre des mesures de rétorsion face aux récentes menaces tarifaires de DonaldTrump - et a auparavant délibérément laissé échapper des moyens de pression pour les négociations avec les Etats-Unis.

    WASHINGTON/BRUXELLES (Rapport exclusif) - L'UE ne réagit pas par des mesures de rétorsion aux récentes menaces tarifaires du président américain Donald Trump et rejette les demandes en ce sens émanant par exemple de la France ou du Parlement européen. Après l'annonce de Trump d'imposer des droits de douane de 30% sur toutes les importations en provenance de l'UE à partir du 1er août, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré que Bruxelles « prolongerait la suspension » des contre-mesures « jusqu'au début du mois d'août ». Mme von der Leyen avait déjà fait en sorte qu'un ensemble de droits de douane de rétorsion sur les importations en provenance des Etats-Unis, d'une valeur de plus de 21 milliards de dollars, ne soit pas mis en vigueur. Elle a ainsi tenu compte des exigences du gouvernement allemand, qui souhaite éviter à tout prix une escalade du conflit afin de ne pas mettre en péril les activités de l'industrie allemande aux US. Il dépasse de loin le commerce allemand avec n'importe quel autre pays. Von der Leyen a même délibérément abandonné plusieurs moyens de pression à cet effet, comme l'introduction éventuelle de taxes numériques européennes et l'extension éventuelle des activités en Chine. Trump exploite aujourd'hui sans retenue la dépendance qui en résulte. Lire la suite

  • La voie vers la bombe

    Le débat sur un éventuel armement nucléaire de l'Allemagne ou de l'Europe se poursuit. Pendant qu'une bombe allemande n'est pas exclue, des experts berlinois conseillent d'agir avec prudence.

    BERLIN/PARIS (rapport exclusif) - Des experts en politique étrangère berlinois recommandent une approche prudente dans la recherche d'un armement nucléaire autonome de l'Allemagne ou de l'Europe. Il ne suffit pas de se placer sous le parapluie nucléaire français, selon le dernier numéro de la revue Internationale Politik, publiée par la Société allemande de politique étrangère (DGAP). La France aurait concentré la Force de frappe sur la dissuasion, en menaçant de détruire complètement les centres de décision russes ; elle ne disposerait pas d'armes nucléaires tactiques et ne serait donc pas en mesure de réagir de manière adéquate à une attaque russe avec de telles armes en Europe de l'Est, selon la Fondation Science et Politique (SWP). L'acquisition immédiate d'une bombe allemande ou européenne susciterait une forte opposition et inciterait plusieurs autres États à se doter de l'arme nucléaire. Il s'agit donc de garantir pendant un certain temps le bouclier nucléaire américain et, dans le même temps, de développer discrètement ses propres capacités nucléaires. Aux Etats-Unis, on discute actuellement d'une première frappe nucléaire contre la Chine. Lire la suite